Formes et compositions

Publié le par Ateliers du Sydhe

La composition dans une œuvre d’art est primordiale (si peut –être primordiale une chose extraite par rapport aux autres, en l’occurrence ici, la matière, la couleur).

Il n’est pas courant de lire des réflexions sur l’importance de cette composition, sur son impact. On sait la reconnaître, la saluer, la regretter mais peu de fois on se penche sur la force de sa présence.

 

Il est certains cas où la composition, c'est-à-dire l’agencement des formes à l’intérieur d’un espace, semble absente. Je pense aux toiles de Pollock ou encore à toutes ces démonstrations de taches, gouttes et autres traces comme jetées « au hasard » sur une toile. Cependant si l’artiste doit passer outre l’idée de composition, il jette ses taches en dedans et en deçà de la toile, prenant la fond, le sol, le mur ou autre support de l’œuvre comme œuvre elle-même, et cela n’empêche pas le mouvement de se faire en osmose avec une forme, alors la composition est toujours là. Il y a une sorte de réflexion consciente ou pas, mais une recherche de quelque chose, donc une direction donnée, donc une composition.

 

Dans certaines peintures, dessins dit d’amateurs, qui ne semblent  pas forcement avoir fait l’étude savante de cet agencement mais juste une copie d’un joli paysage, il se trouve aussi et toujours une trace de cette composition, de cet agencement de la toile. La part copiée de la nature est une part qui interpelle, qui touche en soi, c’est elle qui induit la forme et la direction. La composition est induite dans la nature reproduite, c’est elle qui fait choisir cet angle et pas un autre.

 

C’est dans les plus belles œuvres de notre histoire de l’art une des plus grandes réussites, un des attraits les plus secrets, les plus inducteurs. Que ne restons – nous pas silencieux devant les rondes boucles des toiles de Raphaël, les angles blonds de Van Gogh, les flous tirés de Turner. Non il n’y a pas que la couleur, il n’y a pas que la matière. Il y a la forme et les tracés qu’elle engendre font glisser notre regard comme au plus profond de notre secrète humanité.

 

A quoi fait écho cette composition, qu’éveille t-elle, qu’évoque t-elle pour nous toucher si sensiblement et si profondément ?

 

Cet agencement des lignes et des formes qu’elle soit ronde, droite, courbe ou linéaire nous renverrait à une sensation première et primitive, en quelque sorte elle toucherait le plus archaïque de notre âme. Un élan, une volonté d’aller, une volonté de mouvement, une quête de rythme, en quelque sorte une pulsion de vivre. S’arque boutant dans un sens ou dans l’autre, il semble évident que plus la composition est porteuse de « sens » plus « ça marche ». C’est exactement comme si nous retrouvions le mouvement le plus sûr pour nous donner le bon élan, comme si nous allions chercher le « la » dans la danse du monde ; cela ressemble à une sorte de secret, la magie de l’art qui par un simple trait  peut éveiller notre esprit et nous faire entrevoir « autre chose ».

 

IL n’est pas certain que le rôle de l’art soit simplement de nous faire ressentir des émotions. Il se peut qu’il soit capable de toucher au plus intime de notre réalité, la source même, secrète et lointaine de notre essence vitale. Bien sûr certaines œuvres éveillent le sentiment, certaines se donnent le  rôle d’éveiller à une réalité contemporaine, démonstration d’un ici et maintenant, témoin d’un époque, révélateur …. Mais certaines œuvres vont plus loin et semblent pouvoir à travers une imagerie fort simple nous laisser pantois, comme hypnotisé, amoureux, dans un désir de fusion intense.

 

Les racines archaïques des mots, sons et vibrations qui portent les mots, permettraient à nos inconscientes de comprendre instantanément le sens profond de ce que nous voulons dire, au-delà de la pensée et de l’intellect qui en reçoivent l’enrobage linguistique.

Ainsi pourrait en être la forme des compositions qui au-delà de l’objet représenté, peut jusqu’à l’abstraction ultime nous émouvoir plus loin que le sentiment. La forme pourrait faire écho d’un trait premier ornant les grottes rupestres de nos mémoires. Il suffirait alors qu’elle épouse le souvenir parfait des danses qui modèlent le monde, la couronne fleurie qui génère la vie pour nous hanter, délicieusement.

 

 

Publié dans Essais

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